jeudi 14 février 2008

Jonathan Littell et le nez d'Hitler

En 2006, on avait un peu hésité à l'acheter. Séduits par les louanges, attirés par la double attribution du prix Goncourt et du grand prix du roman de l'Académie française, rebutés par l'avalanche de critiques négatives mais surtout intrigués par tout ce bruit médiatique, on s'était finalement décidé.
Et puis, dans les rayons de la librairie, 1 kilo 400 grammes de polémique littéraire dans les mains et une étiquette qui affichait 25 euros en avaient fait changé d'avis plus d'un: non finalement, ça pouvait attendre, le livre avait rejoint les rayons.

Curieux, réjouissez-vous donc, car Les Bienveillantes de Jonathan Littell vient de sortir en version poche: 1456 pages, une couverture rouge sang et un prix de 11 euros. De quoi juger plus sereinement de la teneur de ce pavé, "gigantesque canular" pour certains, "chef d'oeuvre du XXIème siècle" pour d'autres.

Ce qui est amusant, c'est que la sortie en poche des Bienveillantes ne rend pas service qu'aux porte-monnaies un peu plats. Jonathan Litell en a profité pour rectifier les erreurs factuelles qui lui avaient été reprochées. Lieux, grades hiérarchiques ou services de l'administration hitlérienne, dont l'auteur avait conservé les noms allemands (souci de réalisme? préoccupation poétique?), ont été corrigés.
Plus important, la variante apportée par Littell. Elle concerne une scène très critiquée de la dernière partie : dans le bunker du Führer, le personnage principal se retrouve devant Hitler. Dans la version originale, Max Aue tordait le nez du Führer, ce "nez slave ou bohémien, presque mongolo-ostique" qui le fascina tant.
Les critiques en avaient pris prétexte pour dénoncer le côté kitsch et grand guignol du roman. Dans l’édition de poche, Max Aue lui mordra plutôt le nez, c'est décidé: "Alors je me penchais et mordais son nez bulbeux à pleines dents." Un ultime pied-de-nez de Littell à ses détracteurs?

1 commentaire:

Marine a dit…

Très bien mené ce papier, vraiment :)